Ce One Man Show de quasi 2h est un plat principal ! Rassasié et presque éreinté à force de le voir gesticuler, on quitte Jérémy Ferrari avec des questions plein le crâne. Mais l'humoriste de 31 ans, révélé par Laurent Ruquier, ne fait pas que gesticuler : il a travaillé d'arrache pied pendant deux ans pour offrir du fond.
Tout y passe : l'administration Bush, la colonisation, la police (en roller), l'armée française et son maigre patrimoine, Hitler, le conflit israélo-palestinien, l'islam, le droit d'ingérence, Daesh, comparé à une start-up "swag" parce que doté d'un personnel "connecté", les ONG, le recrutement des terroristes... et plus encore.
Il ne craint pas de choquer. Il annonce et dénonce, le reste c'est notre problème. C'est un travail de fourmi que d'avoir cherché à comprendre toutes ces actualités complexes et l'histoire de la grande Histoire. C'est être doté d'une volonté obsessionnelle que de vouloir savoir pour faire savoir, pour expliquer et informer les autres. Jérémy Ferrari éclabousse son public par sa verve rapide et didactique. Il semble être en lévitation tellement les sujets l'irriguent.
Il serait trop aisé de nous balancer le tout d'un coup, comme ça. Non, lui, avance doucement, puis crescendo. Les terroristes sont largement épinglés montrant ainsi leur bêtise crasse et leur ignominie. Le public, lui, est gêné mais ravi. Il n'hésite jamais à applaudir. Il se tait juste quand vient l'instant sérieux car l'artiste ne se contente pas de nous tuer de rire, il tente de nous toucher en parlant de lui et de la façon dont il est arrivé à ces conclusions. Il s'adresse aux personnes dans la salle ! Elles existent et prennent forme. Rien à voir avec une masse floue et anonyme venue pour se changer les idées. On est vu par lui puisqu'il nous agite et nous oblige.
Jérémy Ferrari est utile. C'est appréciable quand le discours de quelqu'un pousse les autres à changer d'avis. Il fait partie de ceux qui ne s'échinent pas à parler pour ne rien dire. Il fait partie de ceux qu'il faut aller voir sans retenue.
Il "emmerde" comme Zola accuse. Et la lumière s'éteint, nous laissant à nos réflexions.
Yasmina Jaafar