Si je dis la vérité, en fait : pas vraiment. Quand je suis arrivée à TF1, m’avait précédée des femmes comme Marine Jacquemin, Patricia Allemonière ou encore sur d'autres chaînes, Mémona Hintermann. Ce sont ces femmes-là qui ont montré la voie. Elles ont dû payer de leur personne et de leur environnement familiale pour mettre le pied dans la porte et dire : "On est là et on existe !". Elles étaient déjà reporter voire grand-reporter sur des terrains difficiles et assez rapidement, il y en a eu d'autres. Je n'ai donc pas éprouvé de difficultés à pouvoir partir sur le terrain. Michèle Cotta a été ma patronne et de ce fait je n'ai jamais eu l’impression que d'être une femme était un poids.
Non, parce que je pense que la vie dans nos rédactions audiovisuelles (ça a sans doute été plus dur dans la presse écrite) mais à TF1, j'ai toujours senti qu'il n'y a jamais eu une carrière masculine davantage poussée qu'une carrière féminine.
C'est assez paradoxale en effet... Ces outils serviront pour l’intérieur de nos contenus mais au seins de nos rédactions, nous avons des femmes qui sont chefs de pôle, grands-reporters ou encore JRI.
Oui, il y a cette même ouverture d'esprit. Peut-être que l’entité info au sein de TF1 est un peu spécifique et que dans d'autres c'est plus compliqué. Après, je ne dis pas qu'il ne faut pas se pousser un peu plus à des postes de hiérarchie.
Nous sommes deux. Mais nous sommes des opérationnelles : moi à l'info et Christine Bellin à la stratégie. Souvent dans les Comex, on retrouve des femmes à la communication ou à la RH et bien ici, nous avons deux hommes à ces postes (rires). Être une femme ne doit jamais être un frein à l'évolution, ensuite il se pose une question personnelle...
C'est un point qu'il faut pousser, mais pas seulement vers les femmes. Je pense qu'il faut aussi le pousser vers les hommes parce qu'il faut que les hommes patrons, même s'ils sont très ouverts, comprennent que c'est quand même pas simple pour certaines femmes de faire le premier pas. Et que même si un poste est ouvert, elles n'iront pas forcement si on ne vient pas les chercher.
Oui, et je crois que la mixité porte bien son nom. C'est pas l’affaire que des femmes ou que des hommes. Ça serait ridicule. C'est vrai que moi-même, sur quelques postes, il a fallu qu'un homme me dise : " Je suis sur que tu as les compétences. Il faut aller vers ce poste". Ce qui me bloquait ça n'était pas l'équilibre familiale parce que de ce côté j'ai eu la chance d'être soutenue à la maison mais je me demandais surtout si j'allais savoir faire, si ça n'était pas trop tôt... Et quand cette hésitation pointe, il faut que des hommes imposent quasi ce choix. Et qu'ils croient en nous ! C'est très important.
Il ne faut jamais considérer que c'est acquis. Ne jamais lâcher le combat. Il ne faut jamais penser que parce que nous, nous avons compris ces codes donnés à une rédaction, que ça va aller de soi. Non, ça ne va pas de soi. Même une rédactrice en chef ou une présentatrice, elle peut faire un plateau qu'avec des hommes par souci d'automatisme et d'efficacité. Elle ne va pas forcement "militer".
Oui, le mot est un peu tabou. Mais non, on n'est pas militante parce qu'on veut faire des plateaux paritaires ! C'est une forme de logique, d'équité et surtout de richesse par rapport à l'antenne et à nos contenus. Autant enrichir les regards. Il ne faut pas seulement parler, il faut aussi agir, d'où les ateliers de formations, les réseaux et les mises en contact.
Exactement comme la primaire des Républicains : nous allons proposer un premier débat le 12 janvier et sans doute co-diffuser et co-produire celui d'entre 2 tours. Ça me semble normal qu'il y ait une équité. Les téléspectateurs ont fortement adhéré : il y a eu 5.600 millions pour le premier débat LR. C'est important de pouvoir donner un maximum d'informations et de donner à réfléchir à un maximum de téléspectateurs.
La télévision a un rôle majeur à jouer. Elle reste un média leader et elle participe à forger les consciences. On donne accès à une information validée, crédible, vérifiée et sérieuse. Et plus il y a de canaux d'informations et plus il y a besoin de hiérarchie, de priorisation.
En fait, il y a un régime commun valable pour toutes les chaînes qui dit que au-delà de 30 min de journal, on a le droit de couper par de la pub. TF1 a été soumis à une règle supplémentaire qui interdisait toutes Pub même au-delà des 30 minutes. Nous demandons donc de revenir au régime général et d'avoir le même traitement que les autres chaînes. On ne sait pas si à l'avenir, nous n'aurons pas des journaux beaucoup plus long...
Yasmina Jaafar