C’est l’une des pierres angulaires de notre Démocratie : c’est par cette expression marquante que la Cour européenne qualifie la liberté d’expression. La plus belle des définitions de cette liberté est celle que lui offre la Convention européenne (article 10) qui stipule qu’elle recouvre la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence des autorités publiques.
L’exercice de la liberté d’expression n’est pas absolu : il comporte des devoirs et des responsabilités, si bien que cette liberté peut être soumise à certaines restrictions qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sûreté publique et à la prévention d’un crime notamment. Dans notre affaire, Nick Conrad chante dans son clip PLB « Je rentre dans des crèches, je tue des bébés blancs, attrapez-les vite et pendez leurs parents, écartelez les pour passer le temps, divertir les enfants noirs de tout âge, petits et grands ».
Mais ce n’est pas tout car à ces paroles, s’ajoute une vidéo violente dont certains politiques estiment même que la mise en scène est proche des vidéos de l’État islamique. C’est dire l’émoi que cette séquence musicale suscite. Le Parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire du chef de provocation publique à la commission d’un crime ou d’un délit : c’est un délit dont l’auteur encourt 5 ans d’emprisonnement et 45.000 euros d’amende (article 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse).
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De façon générale, les tribunaux français offrent une portée étendue à la liberté d’expression et plus encore lorsque sont examinées les paroles d’une chanson. La limite, expressément prévue par la loi, réside dans l’interdiction d’inciter à la commission d’un crime ou d’un délit : ici malheureusement, les paroles de PLB ne laissent pas de place au doute. Le seul sauf-conduit pour Conrad serait alors, me semble-t-il, de se réfugier derrière la liberté de création de l’artiste qu’il est et de démontrer qu’il n’incarne pas les personnages de son clip.
Les cas d’Orelsan et de Medine sont bien distincts de celui de Nick Conrad : dans les deux premiers cas, seules étaient en cause les paroles de leurs chansons. Ici, les paroles du clip de PLB sont illustrées de vidéos mettant en scène des cadavres : pas sûr que les tribunaux examinent de façon aussi souple cette séquence audio-visuelle.
Tout dire oui, mais tout dire et tout montrer, je ne le pense pas.