"Deux commandos marines tués à très courte distance, la France a perdu deux de ces fils et nous... nous perdons deux de nos frères". Le Général François Lecointre.
C'est compliqué de se réjouir du succès de l'assaut au Burkina Faso. Un sacrifice qui rappelle celui du Colonel Beltrame. Le sacrifice est un acte au-delà du courage. Cette action suprême montre que la France a des héros. Nous ne pouvons que nous incliner devant ce drame. Libérer des otages est un risque. D'autres démocraties comme les États-Unis n'ont pas la même politique. Leur vision serait davantage de laisser les otages à leur triste sort histoire de ne pas jouer la surenchère. La grandeur de l'hexagone est justement de tout risquer pour que les otages soient libérés. Le signe d'une dignité forte qui émeut la France. Florence Parly, ministre des armées a, en effet, indiqué : "Jamais nous abandons nos otages".
Après la cérémonie privée du lundi 13 mai, Emmanuel Macron rendra un hommage national aux deux soldats français aux Invalides ce matin. L'armée paye un lourd tribut…
Un secteur dans le viseur…
Aucune polémique n'est supportable aujourd’hui. Emmanuel Macron et Jean-Yves Le Drian, ministre des affaires étrangères, ont accueilli les otages le 11 mai. C'est leur rôle. C'est le rôle d'un président qui souhaite assumer cette opération jusqu’au bout. L'accueil fut sobre. C'est aujourd'hui le point d'orgue. L'opposition aurait dû s’éteindre.
Une dernière otage est encore au Mali. Sophie Pétronin, 73 ans, médecin humanitaire, a été enlevée le 24 décembre 2016. Son fils Sébastien Chadaud-Pétronin, tourné entièrement vers le Mali, réclame une "ouverture de dialogue pour un chemin vers la paix". Mais comment ouvrir la discussion avec des terroristes ?
Patrick Picque et Laurent Lassimouillas sont les deux touristes partis séjourner au Bénin. Le parquet de Paris ouvre une enquête préliminaire ce lundi pour arrestation, enlèvement, séquestration et détention arbitraire d'otages. L'opération Barkhane existe depuis le 1er août 2014. Cinq ans d'action au Sahel. Une région où la France courageuse semble seule. L'investissement est tel qu'elle n'a pas d'autre choix que de rester là-bas au risque que l'endroit s'embrase. Un secteur fragile, une terre de sécheresse aux populations pauvres. Daesh se meurt en Syrie, certes. Mais se déplace en Afrique de l'ouest où les otages restent une monnaie d'échange efficace. Les stratégies se propagent et gangrènent la région. Des groupes comme "les défenseurs de l'Islam" et d'autres plus petits se baladent entre banditisme et djihadisme.
Les opérations de libération à haut risque continueront. Les visites touristiques en Afrique continueront aussi... mettant en danger l'armée française. Faut-il créer une "zone rouge" qui interdirait ces voyages ? N'est-il pas plus intéressant de prévenir et de laisser le libre arbitre s'opérer ? Une interdiction n'empêcherait nullement les risques, en ce domaine le "zéro" n'existe pas. L'Humain a tendance à se mettre en danger.
Le Quai D'Orsay réfléchit quant à l'évolution de cette zone complexe. Une zone où les tensions bougent rapidement. La Côte d'Ivoire peut être menacée alors que le Bénin était considéré comme en avance. Un pays pionnier moins risqué que d'autres et pourtant sa proximité avec le Burkina Faso l'expose. Le malaise s'étend… L'adaptabilité des terroristes est sans limite. Peut-être faudrait-il combattre ces groupes militairement mais aussi politiquement.
Les agences de voyages ont une responsabilité à jouer. Couvrir un continent entier est impossible. Les territoires dangereux ne sont rien d'autre que des territoires dangereux. Ces touristes désormais libres vont sans doute penser longtemps aux soldats Maître de Pierrepont et Maître Bertoncello. La responsabilité individuelle joue aussi son rôle.
Les hommes de Hubert étaient expérimentés à la hauteur du commando qui a eu Ben Laden. Quatre otages sauvés et quatre terroristes tués. Ce sont là deux de nos meilleurs soldats.
Les technologies américaines ont eu leur importance dans ce "succès". Les actions militaires sont des combinaisons de forces vives. Des liens opérationnels. Épervier, Serval, Barkhane… d'autres opérations de cette difficulté se monteront et comme le dit avec dignité la compagne de Alain Bertoncello, Léa Latourte, 26 ans "Alain Bertoncello était mon compagnon. C’était un homme joyeux, souriant et drôle. Nous croquions la vie ensemble et nous étions très complémentaires dans une relation fusionnelle. Nous avions de nombreux projets. Alain était humble, actif sur tous les fronts. Serviable, attentif, perfectionniste. C’était un homme parfait et c’était mon soleil. Il était là pour remplir sa mission et il l’a fait jusqu’au bout. Son but, c’était de sauver ces vies-là. Ce sont des surhommes, ses camarades et lui, c’est l’élite de l’armée française" .
Habituellement des otages meurent.
"J'ai trois enfants et je suis fier d'eux. Mon fils a réussi sa mission ! Comment puis-je ne pas être fier ! Je viens de perdre mon fils, si en plus je n'étais pas fier... Mais j'étais fier déjà avant" Les mots de Jean-Luc Bertoncello. La France aussi est fière de Maître de Pierrepont et de Maître Bertoncello.
L'hommage est rendu aujourd'hui dès 10h, Pont Alexandre III. Les français sont attendus pour suivre les cercueils. Emmanuel Macron a twitté "Ils ont donné leur vie pour en libérer d'autres. Mardi, nous rendrons un hommage national aux Invalides à Cédric de Pierrepont et Alain Bertoncello. Dès à présent, portons nos pensées vers leurs familles et frères d'armes." Ensuite, le président remettra, à titre posthume, la légion d'honneur, comme il l'a fait pour le Colonel Arnaud Beltrame, tué lors de l'attentat de Trèbes en mars 2018. Ces héros auxquels nous pensons quand le drame survient nous rappellent nos valeurs communes.