"Jouer avec le feu" est le film à ne pas rater en cette rentrée 2025. Plusieurs raisons à cela : Meilleure interprétation masculine pour Vincent Lindon à la Mostra de Venise 2024, intelligence du scénario signé Delphine et Muriel Coulin, à qui l'on doit déjà le très bon "17 filles" (2011) et une mise en abîme qui touche notre réalité politique et sociétale. En bref, une réussite ! Un cheminot de nuit, élève seul ses deux fils. Louis, le cadet, réussit ses études et avance facilement dans la vie. Fus, l'aîné, est fasciné par la violence et les rapports de force. Il se rapproche de groupes d'extrême-droite. Pierre assiste impuissant à la dérive de son fils.

Rencontre avec Delphine Coulin pour en savoir plus sur une film fin et sans leçon de morale.

Vous souvenez-vous du choc ressenti à la lecture du livre de Laurent Petitmangin, « Ce qu’il faut de nuit » ? Avez-vous immédiatement voulu l'adapter ? et pourquoi ? 

Nous réfléchissions ma soeur et moi à un film sur la situation politique en France aujourd’hui, et plus précisément sur ceux qui, comme nous, assistent à la progression des idées d’extrême-droite autour de nous avec sidération. On se disait que la politique a une influence y compris sur nos rapports amicaux, familiaux, de voisinage, etc. 

Et on a lu ce livre, Ce qu’il faut de nuit de Laurent Petitmangin, en se disant à chaque page que ce serait une adaptation à faire au cinéma. On a aussi tout de suite pensé à Vincent Lindon dans le rôle du père qui voit son fils aîné se mettre à défendre des valeurs totalement opposées aux siennes. Qu’est-ce qu’on fait dans ces cas-là? On se met en colère, on attend que ça passe, on discute…? Et est-ce qu’on en est pas un peu responsable, de cette dérive des autres vers des idées nauséabondes? 

Diriez-vous que c'est un film politique, au regard de la résonance avec notre actualité et le vent des radicalités ou est-ce avant tout un film intimiste sur le basculement d'une famille ?

Oui, c’est un film politique, mais qui s’inscrit d’abord dans la sphère familiale. Ces trois personnages cherchent à faire famille comme notre pays cherche à faire société. 

17 Filles, qui a reçu le prix du Meilleur premier film français au Festival de Deauville, traitait déjà d'un sujet de société fort et féministe. Est-ce votre passé de productrice de documentaires pour Arte, qui forge vos choix de création ?

C’est certain que j’ai un fort intérêt pour les documentaires - et pour le monde dans lequel je vis. Mais j’adore aussi la fiction, et j’écris des romans… L’articulation entre le réel et l’imaginaire m’intéresse. Comment l’un aide à supporter l’autre (et vice versa!)

Comment vous répartissez-vous le travail avec votre sœur Muriel ?

On ne répartit pas le travail, on partage un peu tout. On prépare beaucoup en amont, à deux. On définit nos parti-pris de réalisation, notre mise en scène, les décors, les costumes, tout, en préparation.

Vous êtes active au sein du collectif 50/50. Que diriez-vous de la représentativité des femmes dans le cinéma français en 2025, réalisatrices, actrices, chef de poste... ? Du mieux  ou une stagnation ?

C’est mieux, mais les femmes ne représentent encore que 25% des réalisateurs, et elles sont moins payées, ont moins de budget… Il y a encore beaucoup de progrès à faire, comme dans la société dans son ensemble !!!