"Mustang" vous saisit d'un bout à l'autre. Une histoire qui se passe aux portes de l'Europe. C'est le début de l'été... Cinq sœurs vivent dans la légèreté inhérente à l'enfance et à l'adolescence. Mais un jeu d'eau innocent avec des garçons créera le scandale... Ces jeunes femmes prendront la décision de se battre, de s'imposer face à un père, un chef de famille qui prend son rôle trop au sérieux. Une honte, un besoin quasi carcérale de contrôler son petit monde, l'homme dérape. Un jour, tout le temps.
Deniz Gamze Ergüven, ancienne de la Fémis, convoque la réflexion sans agressivité ni ton professoral ou politique mais avec une grande maîtrise loin, très loin de la petite savante agaçante. Son premier long est un tour de force tant au niveau du scénario que de la mise en scène ou de la lumière. Un bout de la Turquie au bord de la mer Noire posté à 1000 km d'Istanbul, vue à travers le prisme de la beauté enfantine,... et du déni de la féminité.
La forme et le fond se confondent pour le meilleur. Vissé dans son fauteuil, on est kidnappé pour finir ému. Pour ces jeune filles, il n'y a aucun choix cornéliens. Tout est clair : il s'agit de se battre pour leur liberté. Elles ne courent pas après l'illusion du bonheur, elle l'enfourche.
Un film atteint par son sujet. C'est parfois drôle, parfois émouvant, toujours poignant. La caméra est posée sur des femmes coincées en leur intimité et leur besoin d'Etre. Etre une femme en Turquie. La réalisatrice a vécu certaines scènes et a voulu nous raconter une réalité sans militantisme.
"Mustang" veut dire "petit cheval fougueux". Une fougue qui traverse pour nous laisser à genoux. Le plus beau film de cette année.
Mustang, sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes 2015, sortie le 17 juin. La bande son est signée Warren Ellis.
Yasmina Jaafar