Cette semaine, une date. Une seule.
Mercredi 13 novembre - "Ils prétendent m'expulser de la famille humaine, dénient mon appartenance à l'espèce humaine", déclare Christiane Taubira, ce mercredi soir sur le plateau de David Pujadas. La Garde des Sceaux fait l'objet depuis quelques temps de critiques à caractère raciste. Tout commence le 25 octobre. Journée marquée par le mot "guenon" prononcé un par enfant flanqué d'une peau de banane, lors d'une manifestation anti-mariage gay. Charmant. Puis, par le photo-montage comparant la Ministre à un singe de 18 mois avec une légende évocatrice et diffusé sur le réseau facebook de la candidate FN, Anne-Sophie Leclere, exclue depuis.
Ces faits seront suivis d'une réaction de la responsable politique dans les colonnes du quotidien Libération où elle s'étonne du peu de voix "hautes et belles" qui s'élèvent contre de telles attaques. Depuis, ces voix se sont reveillées en commençant par le Président de la République, du Premier Ministre saisissant la justice, de la plainte de SOS racisme qui joue son rôle et des personnalités noires comme Harry Roselmack qui "déplore le retour de la France raciste".
Depuis, il y a eu la "Une" immonde du magazine Minute. Depuis, un débat s'instaure au creux des rangs politiques tous unanimes pour exprimer leur écoeurement. Un débat poli et évident qui oblige un hochement de tête navré, indigné et rempli de mots solidaires. Une réaction obligatoire en pleine Journée de la gentillesse. Mais au-delà de la couleur de peau (la mienne), il s'immisce un autre débat plus important : faut-il parler de cette "Une" au risque de faire de la pub à cette parution née en 1962 et connue pour des chiffres de vente minuscules voire inexistants ? Je réponds "OUI". Parlons-en. Parlons d'eux. Ne les oublions pas en les mettant sur le banc des remplaçants en mode pause. Les voir et les entendre répond à cette pratique française liée à la liberté d'expression mais surtout permet de ne jamais banaliser les idées racistes en les cachant sous le tapis d'une société qui ne veut pas voir. Marine Le Pen semble agir en s'indignant comme les autres et dans le seul but de rendre son parti plus acceptable voire fréquentable mais rien n'empêche la fermeté, le 13 novembre, de Christiane Taubira : "Tant que le FN ne reniera pas son héritage, tout ce qui fait son identité, je ne pourrais pas croire [à leur condamnation de la une de Minute]. (...) C’est juste de l’hypocrisie, de la lâcheté".
L'idée raciste qu'une race est supérieure à une autre s'estompe peu à peu en France. Mais la crise économique et identitaire exacerbe les replis sur soi et pousse à une intolérance nauséabonde (59% des Français estiment que le racisme avance dans notre pays - sources : Opinionway/octobre 2013). La période menaçante laisse donc place à une xénophobie galopante plus qu'au racisme. Notons les différences de terminologie sans tout confondre et faisons face.
Ici, celle qui est à l'origine de la loi Taubira (2001) reconnaissant comme loi mémorielle, le crime contre l'humanité des traites négrières et de l'esclavage, est bel et bien victime de racisme. Et si Minute assume son aversion pour l'Élue guyanaise. Nous, assumons à notre tour, notre capacité à dire "NON". Reprenons en coeur les propos de Jean-Marc Ayrault " Le racisme n'est pas une opinion, c'est un délit puni par la loi".
L'indignation ne suffit plus.
Yasmina Jaafar