"La guerre est née de la furie des hommes. Ils ont eu la rage d'en finir. Ils espèrent la délivrance..." sont les mots de Mathieu Kassovitz pour annoncer le cinquième et dernier volet de la série "Apocalypse : la première guerre". Le service public a su faire confiance au couple d'auteur et réalisateur Isabelle Clarke et Daniel Costelle pour livrer une œuvre extraordinaire de 5 heures extraites d'environs 500 heures de ruchs. Apocalypse est la première série de ce type à connaître un succès planétaire : plus de 165 pays ont déjà vu ce travail de fourmis. Alors, évidemment, un tel succès ouvre des portes, indique Daniel Costelle. Il a donc été plus aisé ensuite de récupérer des images rares. Au delà de la pédagogie, la volonté du duo, en studio comme à la ville, depuis 25 ans, était de "rendre les choses extraordinairement proche de nous". Pari tenu ! Les 5,6 millions de téléspectateurs français ont été séduits par ces images colorisées qui permettent de discuter l'histoire, de mettre entre les mains des plus jeunes l'épopée inutile et monstrueuse de la première grande guerre, de lancer des débats, de lutter contre l'oublie, de comprendre et analyser les faits.
Daniel Costelle ne souhaitait pas plus "une commémoration du vainqueur que de rendre hommage à des hommes qui ont combattus" sans savoir pourquoi. La bêtise humaine est à l'honneur tout au long des cinq épisodes. L'incompréhension de l'instant. Une guerre pour rien. Un conflit dénué d'idéologie qui confine avec l'effroi et la torpeur. Impossible pour quiconque de comprendre les motivations d'une guerre mais ce dernier point créait la différence fondamentale entre celle de 14/18 et celle de 39/45. Sans idéologie, un sentiment de "tout ça pour ça" écœure. Quatre ans d'horreur où il n'est pas pensable de dire "Pouce ! Je joue plus". Impensable de se retirer, de dire "NON". Il fallait y aller, le sourire en avant. Même les indigènes des pays colonisés et occupés devaient défendre une non-cause. Des tirailleurs morts par milliers. Une injustice qui étouffe.
Il y a peut-être débat sur une forme de mise en scène à l'aide d'images allégoriques parfois troublantes comme "la faucheuse" mais la vérité historique n'étant pas remise en cause, laissons la possibilité à France 2, Daniel Costelle et Isabelle Clarke de nous raconter le passé avec cette intensité. Six ans après "Apocalypse : la deuxième guerre", autre œuvre majeure, les auteurs offrent un film à l'inverse de la froideur rempli d'arguments et de découverte. Mais surtout, ils nous rappelle qu'en 2014, les guerres qui nous envahissent sont chirurgicales, maniées avec finesse, lointaines mais restent toujours le premier danger de l'humanité.
Yasmina Jaafar