Issue de la danse, écrivaine voyageuse, Anyel ADDA aime la musique métissée. De Casablanca à Conakry, de Paris à Jérusalem, l'artiste donne de la voix et espère une paix possible.
Quel est le message de votre nouveau titre d’Abdel et Mikael ?
Le point de départ de mon nouveau titre « Abdel et Mikael » était une façon de rendre hommage à mon oncle Shlomo Elbaz, militant pour la paix entres Israéliens et Palestiniens et hommes de lettres. Il m’a transmis son goût pour la culture orientale et ses valeurs humanistes. Ce clip, est un peu ma façon de poursuivre son engagement et j’ai situé la chanson ici en France car les thématiques d’ci résonnaient aussi avec son analyse de la situation là-bas. Comme le dit le refrain de la chanson Abdel et Mikael, 2 amis d’enfance, l’un juif, l’autre musulman sont les « fruits d’un même arbre » indissociables, tels des frères, issus d’une même terre et reliés par une histoire commune. Lors des tensions extérieures rapportées par la politique et les médias, ni l’un, ni l’autre ne se laissent influencer par les discours qui divisent. La nouvelle situation avec le confit importé fragilise encore davantage les relations entre les deux communautés juives et musulmanes. Mais, à leurs yeux leurs liens d’amitié sont bien plus forts.
À travers Abdel et Mikael c’est un message d’espoir porté par une génération qui grâce à l’amitié invite à s’ouvrir à l’autre, à suivre le chemin vers une compréhension mutuelle , « main dans la main ». C’est un message de tolérance et de fraternité.
Avez-vous encore un espoir pour la solution à deux états ?
Le clip sorti en Novembre a déjà reçu le soutien de la Licra, La Paix Maintenant , l’AJMF (amitiés judéo-musulmanes de France) qui écrivent et débattent sur le thème de la paix. Une solution à deux états y est toujours évoquée comme étant la mieux adaptée pour retrouver un équilibre durable dans la région, et compte tenu des tensions actuelles, on espère que les parties concernées devraient parvenir à s’entendre. À partir du moment où on introduit le dialogue, le respect et l’écoute au cœur du débat et des échanges, tout est possible car chacune des parties se sent reconnue dans son existence même. Derrière le sujet du partage de territoire, on retrouve la question des valeurs humaines universelles, de tolérance et de fraternité. J’ai assisté à de nombreuses conférences sur le rapprochement judéo-arabe initiées par Shlomo Elbaz, mon oncle, qui, grand orateur, puisait ses mots dans le domaine poétique pour évoquer la problématique politique tout en nourrissant le débat d’évocations, d’émotions, d’humour. Il savait réveiller la mémoire et l’imaginaire qui font naitre l’espoir.
Pouvez-vous lister les principaux points communs de ces deux communautés ? La raison
d’une entente
Dans ma famille maternelle originaire du Maroc, on aime raviver la mémoire sensorielle de la vie à Marrakech et évoquer les entrelacs des deux cultures judéo séfarades et musulmanes comme étant un enrichissement mutuel. Elles se rejoignent dans le choix des saveurs d’une cuisine épicée , dans la musique comme les mélodies arabo-andalouses, dans la perception sensorielle de la chaleur de la terre où des paysages, des palmeraies au désert et jusque dans leurs langues sémitiques qui s’écrivent de droite à gauche. Leurs liens d’amitiés sont inscrits dans le partage d’une vie commune.
La chanson évoque ces affinités culturelles de façon poétique « Abdel et Mikael la menthe et le
jasmin, Mikael et Abdel , le safran le cumin » et l’histoire commune des deux branches d’une même famille : « c’est l’histoire d’un « ensemencement mutuel » dit le politologue Raphaël Drai. Et l’attraction émotionnelle de cette terre m’a conduite à partir en quête de mes racines marocaines et j’y ai découvert la danse orientale que j’ai intégrée dans mon travail de danseuse. La réussite d’une entente doit passer par l’installation d’un climat de paix durable entre les deux peuples. La paix n’est pas seulement un but à atteindre elle est une nécessité pour vivre ensemble. On peut et on doit garder l’espoir de voir les deux communautés avancer « main dans la main» à la manière d’Abdel et Mikael qui sont en quelque sorte les représentants et les symboles d’un pacte fraternel réussi.